Les 4CM des records de vitesse

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Les Maserati 4CM des records de vitesse de Giuseppe Furmanik



L'ingénieur Giuseppe Furmanik fut l'homme des records de vitesse de Maserati dans les années 30. Sur l'alors toute récente autoroute Firenze-mare privatisée pour l’occasion, Furmanik établit 8 records internationaux entre 1934 et 1937, tous sur ses Maserati privées améliorées par ses soins et l’aide de l’usine ou du centre expérimental aéronautique de Guidonia près de Rome. Nous allons dans un premier temps étudier les Maserati Furmanik de ces records, particulièrement les 4CM. Dans un second temps, je vous dépeindrai l’homme Giuseppe Furmanik qui connut, vous le verrez, un parcours assez étonnant.



Commençons par les voitures. Les dates essentielles des records des Maserati Furmanik sont les suivantes.

En 1934 : le record mondial 1100 avec la 4CM #1120 (140 cv) enregistrée à 222.6 km/h de moyenne sur un kilomètre lancé.

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En 1936 : avec la même 4 CM 1100 poussée à 150 cv et allégée à 440 kg pour le kilomètre lancé (chronométré à 248.5 km/h de moyenne) ou le kilomètre départ arrêté toujours en 1936 (131 km/h en moyenne sur le kilomètre arrêté).

En 1936 : avec une 8 CM de 3 litres spéciale et poussée à 312 cv, le record du miles arrêté mesuré à 165.5 km/h de moyenne sur 1 miles.


En 1937 : en classe 1500 grâce à la 4CM 1500 « Viotti » chronométrée à 144.3 km/h de moyenne sur le kilomètre départ arrêté et un exceptionnel 168.8 km/h de moyenne sur le miles arrêté (soit mieux en accélération qu’avec la 3 litres de 312 cv de l’année précédente !).

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Mais revenons en 1934 pour le premier record. La voiture était une 4CM (4 cylindres Monoposto) de 1932 avec laquelle Giuseppe Furmanik avait déjà participé à plusieurs courses avant de se décider à la transformer en voiture de records de vitesse. Dans ce but, le poids fut réduit drastiquement de 580 à 470 kg.

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Les jantes « flasques » paraissaient toutes fines (4 pouces) pour offrir moins de frottements et de résistances mais grandes (17 pouces). Pour gagner du poids, il n’y avait pas de freins à l’avant et, pour améliorer l’aérodynamique, on avait remplacé la calandre par une assez fine prise d’air arrondie verticalement.

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A noter les échappements sectionnés au raz du fuselage pour gagner du poids.

Le moteur de série de la 4CM était un 4 cylindres en ligne à compresseur Roots et deux arbres à cames en tête selon la disposition classique Maserati depuis l’origine de la marque. On voit en bas en avant le carburateur Weber 48 ASS contre le compresseur Roots qui comprimait le mélange fourni par le carburateur et l’envoyait directement dans l’admission à droite sans échangeur :

Ce noble moteur délivrait d’origine une puissance de l’ordre de 120 cv mais il avait été poussé à 140 cv sur la voiture de record de Furmanik en 1934. Bien que Furmanik fut ingénieur, les modifications sur sa voiture ont été faites à l’usine Maserati de Bologne où c’était vraiment du « sur mesure » selon les demandes des clients et en concertation avec les frères Maserati, surtout Ernesto.

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Le 28 novembre 1934, Furmanik dans sa voiture à Pistoia (là où l’autoroute Firenze-mare est la plus rectiligne) :

Notez la dérive anti-remous derrière la tête du pilote et une plus grande fermeture du cockpit latéralement par rapport au modèle de (petite) série (seulement 9 exemplaires de 4CM 1100 et 12 exemplaires de 4CM 1500 furent construits). La dédicace est pour Roberto Sozzifanti, alors président de l’Automobile Club de Pistoia.

Le même jour :

Furmanik au volant de son petit bolide en pleine action en train de battre le record mondial 1100 cc avec 222.6 km/h sur un kilomètre lancé :

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Les deux années suivantes 1935 et 1936, avec la même 4 CM 1100 poussée de 140 à 150 cv et encore allégée de 470 à 440 kg, Giuseppe Furmanik bat plusieurs fois le record du kilomètre lancé (jusqu’à 248.5 km/h de moyenne) et du kilomètre départ arrêté (131 km/h en moyenne sur le kilomètre arrêté en 1936). Le Reale Automobile Club d’Italia (RACI) titre sur lui dans sa revue en disant que le pilote et la voiture sont « italianissimes ». Vrai pour l’auto, le pilote d’origine polonaise n’est italien que depuis une quinzaine d’années mais la presse de cette époque était très nationaliste et tout ce qui pouvait relever la gloire de l'Italie était bon à prendre et à exposer largement au public :

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Je n’ai pas réussi à trouver de photo de la 8CM des records de Giuseppe Furmanik en 1936.
Je sais seulement qu’il s’agit de la dernière 8CM construite (#3027 en 1935), que son moteur de 3 litres avait été poussé de 280 à 312 cv (soupapes plus grandes, second compresseur), que son poids avait été réduit de 750 à 660 kg. Furmanik avec elle établit le record du miles arrêté en classe 3 litres à 165.5 km/h de moyenne.

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Et on en vient à la plus célèbre des voitures de records de Giuseppe Furmanik, la fameuse 4CM 1500 « Viotti » :

Cette 4 CM « Viotti » était en fait la 4 CM # 1120 du premier record de 1934 sur laquelle Furmanik avait fait installer une carrosserie de type « pré-streamliner ». En effet, cette carrosserie, très travaillée, avait été étudiée au centre aéronautique expérimental de Guidonia près de Rome et comprenait un cockpit fermé avec une verrière basculant vers l’avant comme sur un avion de chasse, une dérive arrière et des roues partiellement carénées. La réalisation avait été confiée à la carrosserie Viotti de Turin.

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Ci-dessus, le 3 juin 1937, Guerino Bertocchi tient la verrière, Giuseppe Furmanik est debout dans le cockpit et Ernesto Maserati est en chapeau à gauche de la photo.


Furmanik avait déposé le moteur 1100 de #1120 et installé à sa place un vrai petit chef d’œuvre d’Ernesto Maserati, un quatre cylindres de 1500 cc (numéro 1530) ultra moderne de 200 cv à 7000 tr/mn (régime de rotation exceptionnel pour l’époque) avec compresseur de diamètre augmenté de 115 à 130 mm et carburateur Weber 55 AS1.



Furmanik dans le cockpit de son avion de chasse :

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Sans doute pour des raisons de poids, le carénage des roues n’a finalement pas été retenu, ni devant :

ni derrière :

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La 4CM 1500 « Viotti » fut chronométrée le 3 juin 1937 à 144.3 km/h de moyenne sur le kilomètre départ arrêté et à 168.8 km/h de moyenne sur le miles arrêté, soit mieux en accélération qu’avec la 3 litres de 312 cv de l’année précédente !!! Comme quoi, l’aérodynamique et la légèreté, ça compte !

L’homme et sa machine :

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La presse de l’époque avait largement relayé cet exploit des voitures et des pilotes italiens :

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Eh bien voilà, nous connaissons désormais bien cette série de Maserati de records de l’ingénieur Giuseppe Furmanik.

Mais qu’en est-il de l’homme Giuseppe Furmanik ? Voici son histoire assez inouïe racontée sur FR3 Doubs en 2017 :

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L’histoire du petit Joseph Furmanik est une série de drames et de rebondissements comme seule la grande guerre a su en écrire. Arrêté et déporté pour un jeu de gosse, il a traversé la France, l’Autriche et l’Italie jusqu’à devenir un notable richissime et un champion automobile reconnu.

En août 1914, Joseph Furmanik, orphelin de mère, n’a que onze ans. Il vit à Colombier-Fontaine en France dans le Doubs près de l'usine de chaises Baumann où travaille sa famille. Joseph joue « à la guerre » comme tous les gamins de son âge. A l’école, deux groupes se sont constitués, ceux qui crient « vive la France » et ceux qui répondent « vive la Prusse ». Un jour, rentré chez lui, il entend « vive la France » dans la rue et il s’exclame bêtement par la fenêtre « Vive la Prusse ! » Des soldats français l’entendent, rentrent chez lui, et l’arrêtent. Jacob, son père de nationalité polonaise, est aussi arrêté. La Pologne appartient à l’époque à l’empire austro-hongrois, l’homme est par définition suspect aux yeux des autorités. Joseph enfant et son père Jacob :

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Joseph et Jacob sont jetés en cellule, déplacés de prison en prison, à travers toute la France. Souvent dans des conditions épouvantables. Des co-détenus témoignent et s’émeuvent qu’on attache un si jeune garçon « avec des chaînes en fer réservées aux criminels ». Père et fils sont finalement déportés en Corse comme près de 2 000 Alsaciens et étrangers suspects vivant en France pendant la première guerre mondiale. Jacob y passera 5 ans. Le petit Joseph, en revanche, est relâché plus tôt, en 1916, et envoyé chez l’ennemi à Vienne en Autriche. Il s'y instruit grâce à un bienfaiteur (qui repère ses dispositions en mathématique) et débute des études. En 1919, il y retrouve son père. Ils émigrent finalement en Italie, à Naples.

Là, le destin de Joseph bascule. Il tombe amoureux d’une riche romaine qui lui ouvre les portes de la haute société. Il l’épouse, se naturalise italien et change son prénom Joseph en Giuseppe. Il termine ses études d’ingénieur et se fait construire à Rome un hôtel particulier très moderne pour l’époque, « le Palazzina Furmanik ».

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Il conçoit un modèle de parachute, le Salvator-A et le teste devant Mussolini et le roi Victor-Emmanuel III qui le décorent. Le parachute est homologué et sauvera des vies pendant la guerre.

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Giuseppe Furmanik n'a pas hésité à sauter lui-même avec son parachute.
Avec l’argent de sa femme et celui gagné grâce à son parachute, il devient champion automobile. Avec des Maserati, il bat huit records du monde de vitesse. Il devient président du Reale Automobile Club d’Italia à partir de 1937.

Joseph survit à la chute du régime fasciste et meurt de maladie en 1959. Joseph Furmanik n’est jamais retourné à Colombier-Fontaine dans le Doubs, mais il a pris une belle revanche sur ses débuts de vie difficiles.

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Complimenti caro Giuseppe Furmanik. Vous avez inscrit votre nom dans l’histoire de l’automobile et fait briller de façon éclatante celui de Maserati. Nous vous en remercions bien chaleureusement.

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