Maseratitude

La 6CM (6 Cylindres Monoposto)
27 exemplaires de 1936 à 1939
Chers amis Maseratistes, je suis heureux de vous présenter ici l’histoire de l'une des Maserati les plus brillantes d’avant guerre.

C’est en 1936 que Maserati sortit la 6CM, le véritable petit chef-d’œuvre d’Ernesto, un merveilleux et prestigieux « monument » dans l’épopée des « voiturettes » Maserati 1500 cc. Après la malheureuse expérience de la V8 RI (4 Roues Indépendantes mais à l’arrière instable), si l’avant de la 6CM restait muni de roues indépendantes, l’arrière était gratifié d’un très classique essieu rigide et la boîte de vitesses était repositionnée devant, contre le moteur, le second 6 cylindres en ligne de Maserati après la 6 C 34. Ce 6 cylindres en ligne en deux ensembles bloc-culasse de 3 cylindres possédait 2 arbres à cames en tête et délaissait les traditionnelles courses longues du piston pour une architecture non encore carrée mais s’en rapprochant avec un alésage X course à 65 X 75 mm. La course relativement courte pour l’époque réduisait la vitesse linéaire des pistons et autorisait les hauts régimes (6200 tr/mn puis 6600 tr/mn en 1937). Cette belle pièce d’horlogerie de 1500 cc, gavée par un compresseur Roots, « donnait » 155 cv en 1936 puis 175 cv en 1937. Pour un poids de 650 kg, la vitesse dépassait 210 puis 230 km/h.


Avec 27 exemplaires produits, la 6CM connut ce que l'on peut appeler un grand succès commercial dans ce créneau de voitures de course à très hautes performances. Elle s’adjugea de belles victoires en compétition, réussissant souvent à battre les redoutables ERA anglaises. C’est à la Targa Florio, en Sicile, que la 6CM exerça sa plus flagrante suprématie, remportant toutes les éditions d’avant guerre (1937 avec Francesco Severi, 1938 avec Giovanni Rocco et 1939 avec Luigi Villoresi qui récidiva en 1940 mais avec la 4 CL qui succéda à la 6CM).

La première 6CM en juillet 1936 devant le portail de l’usine Maserati qui était encore dans la banlieue de Bologne, à Pontevecchio : On remarque en avant l’ébauche de carénage au dessus de la tringlerie de direction, pièce qui caractérise la 6CM.

Ci-dessous Ettore Maserati (à droite de la photo) teste le proto 6CM au col de la Futa, célèbre passage des Mille Miglia :

La 6CM est présentée au public au salon de Milan en octobre 1936 : On voit bien le boitier de direction avec la tringlerie droite en extra-fuselage.
Le coût du bolide pour les gentlemen drivers voulant courir était de 95 000 Lires soit l’équivalent de 250 000 euros actuels, moins cher qu’une MC20 GT2 !

Les tambours de frein sont énormes avec commande hydraulique (mise au point par Maserati en 1933) :

Le beau moteur 6 cylindres en ligne double arbre à cames. Noter le refroidissement individuel des cylindres par la durite chromée qui amène entre les deux arbres à cames l’eau refroidie par le radiateur. Remarquez aussi la double tringlerie de direction qui part aussi vers la gauche du fuselage :

L’arrière est très fin mais loge tout de même un réservoir d’essence de 122 litres dans le dos du pilote :

C’est à la Targa Florio que la légère et maniable 6CM se révéla la plus compétitive. Victoire absolue (toute cylindrées confondues) de Francesco (dit parfois Giulio dans les articles anglais) Severi à la Targa Florio 1937 :

Victoire de Giovanni Rocco à la Targa Florio 1938 :
La Targa Florio 1939 verra la victoire de la 6CM de Luigi (dit Gigi) Villoresi : A noter ci-dessus la calandre plus inclinée sur les modèles tardifs de 6CM. Ci-dessous toujours la victoire de Gigi en 1939 :


Au volant Luigi Villoresi qui a pris le temps d’enfiler une veste pour la photo du vainqueur : Le même Luigi Villoresi a toujours le souci de l’élégance vestimentaire quand il pose vers 1994 devant l’usine Maserati de Modène avec la 6CM qui appartient encore à l’usine et sera dans la collection Panini à partir de 1998 : Luigi Villoresi fut un pilote extrêmement prometteur à la fin des années 30. La guerre a malheureusement amputé sa carrière des années potentiellement les plus riches. Mais il remporta cependant après guerre de belles courses pour Maserati (notamment les Grand Prix d'Angleterre et de Buenos Aires 1948 sur 4CLT)

La 6CM a connu diverses calandres. La plus fréquente est celle de la 6CM du musée Panini : D’autres modèles ont eu une calandre plus haute : Ci-dessous Giovanni Rocco avec une 6CM à calandre haute et manivelle passant dans la calandre : Et la version finale à calandre très inclinée et carénage complet de la tringlerie externe de direction (ci-dessous Franco Cortese en 1939) : A noter que le dernier châssis 6CM (#1565), en 1939, avait reçu un moteur de 4CL et une carrosserie Streamliner :
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Après le Grand Prix de Tripoli 1939, cette 4CL Streamliner reçut un moteur 6CM mais un exemplaire unique à 24 soupapes et une carrosserie à roues découvertes. Assez vite, il y eu de nouveau un échange pour un moteur de 4CL.

Allons plus dans les détails de la 6CM si vous le voulez bien. Ici, sur ce modèle, notez les prises d’air pour le refroidissement des gros tambours de frein : Les mêmes prises d’air à l’arrière, les lames semi-éliptiques de suspension et l’amortisseur à friction : Je vous rappelle qu'avant guerre, l'amortisseur à friction de disques était très utilisé. En serrant plus ou moins l'écrou au centre des disques, on pouvait régler la dureté (système André Hartford) :
Certaines versions ont un double amortisseur à friction dans l’axe des lames semi-éliptiques : Une tige transversale fixée au châssis permettait de tenir en extra-fuselage les lames de suspension à l’arrière :

Sur cette 6CM, accélérateur au pied droit, boite de vitesse au milieu, embrayage et frein au pied gauche. Mais on pouvait aussi choisir la pédale de frein côté droit, selon la convenance du pilote. Le levier de vitesses sort entre les genoux du pilote et est ici manœuvré à la main gauche : Sur la 6CM du musée Panini, le levier de vitesse est actionné à main droite : Le pilote est vraiment assis sur l’arbre de transmission : Le beau siège baquet de la 6CM Panini : Cette photo ci-dessous d’une 6CM noire montre bien les pieds du pilote de part et d’autre de la boite de vitesse et juste derrière le moteur. Pour piloter ces autos, il fallait sans doute ne pas avoir froid aux yeux mais pas non plus chaud aux pieds !

On voit bien ci-dessous le compresseur Roots devant le moteur et le carburateur juste entre le compresseur et le fuselage. Le compresseur vient après le carburateur, il comprime le mélange air-essence fourni par le carburateur qui était au début un Weber 55 AS1 puis, à partir de 1937, un Weber 50 DCO ou 45 DCO : Le mélange comprimé par le compresseur Roots est directement envoyé dans l’admission, sans échangeur de température :

Un vraiment beau bolide très sophistiqué :

Voici quelques autres photos de 6CM en course.
Luigi Villoresi en pleine action au Grand Prix de Brno en 1938 :

Et toujours le brillant « Gigi » à Monza la même année 1938 :

Encore un article magnifique.
Merci Alido!!!!!!!!!!!!!

Superbe article, précis, documenté et richement illustré. Merci pour ce partage.

Merci les amis, content que l’article vous plaise.

J’ai trouvé d’autres photos.

Gigi Villoresi au volant d’une version tardive à calandre oblique et tringleries de direction carénées :

Et une autre photo du proto sortant d’usine :

Cet article de qualité merci !

Super Doc ! Comme d'habitude très détaillé ! Ca sent la passion !!!!